Vaccin covid-19 de la firme AstraZeneca : quoi de neuf depuis fin janvier 2021 ?

La revue PRESCRIRE nous informe:

covid Dans l’actualité  En France, la vaccination covid-19 en ville par les médecins généralistes avec le vaccin covid-19 ChAdOx1-S a commencé fin février 2021. Quelles sont les principales nouvelles données d’évaluation de ce vaccin rendues publiques depuis son autorisation fin janvier dans l’Union européenne ?

Le vaccin covid-19 ChAdOx1-S (nommé aussi vaccin ChAdOx1 nCoV-19 ou vaccin AZD1222), commercialisé par la firme AstraZeneca, a été autorisé dans l’Union européenne fin janvier 2021. Le 29 janvier 2021, nous avions présenté les principales données d’évaluation alors disponibles ).

En France, la vaccination en ville par les médecins généralistes avec le vaccin covid-19 ChAdOx1-S a commencé fin février 2021. Quelles sont les principales nouvelles données d’évaluation de ce vaccin rendues publiques depuis son autorisation fin janvier dans l’Union européenne ?

Pas de nouvelles données décisives sur l’efficacité. Fin janvier 2021, l’évaluation clinique du vaccin covid-19 ChAdOx1-S était centrée sur l’analyse groupée de résultats partiels issus de deux essais cliniques comparatifs randomisés. Les données analysées étaient celles du 4 novembre 2020 . Fin février 2021, des données avec un mois de suivi supplémentaire de ces deux essais ont été rendues publiques (données du 7 décembre 2020). Il s’y ajoute des données issues de deux autres essais avec des effectifs moindres (1). Les défauts méthodologiques, que nous avions déjà rapportés (importants changements de protocole en cours d’essais, non-prise en compte de nombreux participants dans l’analyse de l’efficacité), rendent fragiles ces résultats (2).

Une analyse groupée de ces quatre essais avec les données du 7 décembre 2020 a inclus environ 17 000 participants adultes sans antécédent connu de covid-19 (1). Ses résultats ont été proches de ceux précédemment rapportés ), avec, à partir du 15e jour après la 2e injection, 84 cas de covid-19 dans les groupes vaccin covid-19 ChAdOx1-S versus 248 dans les groupes témoins, soit une réduction relative du risque de maladie covid-19 symptomatique de 67 % (intervalle de confiance à 95 % : 57 % à 74 %). Deux patients ont été hospitalisés à cause d’un covid-19 dans les groupes vaccin, versus 22 dans les groupes témoins (1).

Dans cette analyse, environ 2 700 personnes étaient âgées de plus de 55 ans (1). Le nombre de cas de covid-19 rapportés dans ce sous-groupe a été trop faible pour évaluer l’efficacité du vaccin. Cela a conduit à écrire dans le résumé des caractéristiques (RCP) européen du vaccin : « les données cliniques actuellement disponibles ne permettent pas d’estimer l’efficacité vaccinale chez les sujets de plus de 55 ans » (3,4).

Dans les essais, du fait des changements de protocole et des écarts par rapport aux protocoles, la durée réelle entre les deux injections intramusculaires de vaccin a varié entre 3 semaines et 23 semaines (3). Des analyses non prévues aux protocoles, donc de faible niveau de preuves, vont dans le sens d’une plus grande efficacité du vaccin quand le délai entre les deux injections dépasse 8 semaines (1).

L’Agence suisse du médicament a fait savoir début février 2021 que : « les données soumises (…) sont encore insuffisantes pour permettre l’octroi d’une autorisation » pour le vaccin covid-19 ChAdOx1-S. Elle a demandé des données supplémentaires provenant de l’essai en cours en Amérique chez environ 30 000 adultes (5). L’Agence européenne du médicament (EMA) a demandé à la firme AstraZeneca de lui fournir au plus tard en avril 2021 des données préliminaires de cet essai en cours (3). Fin février 2021, ce vaccin n’est pas autorisé aux États-Unis d’Amérique.

Syndromes pseudogrippaux très fréquents. Les données disponibles fin janvier 2021 montrent que le vaccin covid-19 ChAdOx1-S expose dans les jours suivant l’injection à de fréquentes réactions au site d’injection (douleurs, gonflements, rougeurs) et à de fréquentes réactions systémiques : fièvres, frissons, douleurs articulaires et musculaires, fatigues, céphalées, malaises, nausées. Dans les essais cliniques, quelques patients ont eu des paralysies faciales après avoir reçu le vaccin (2).

L’Agence britannique du médicament (MHRA) a rendu publics des bilans de pharmacovigilance concernant le vaccin covid-19 ChAdOx1-S couvrant la période du 9 décembre 2020 au 7 février 2021 (6). Pendant cette période, environ 74 000 effets indésirables ont été rapportés chez environ 20 500 personnes. Il s’agissait surtout de réactions au site d’injection et de réactions systémiques (syndromes pseudogrippaux, céphalées, fatigues, nausées, sensations vertigineuses, fréquences cardiaques élevées) dans les jours suivant la vaccination (6). Ont été notifiées aussi 60 réactions anaphylactiques et 26 paralysies faciales (6,7).

L’Agence française du médicament (ANSM) a aussi rendu public un bilan de pharmacovigilance sur le vaccin covid-19 ChAdOx1-S couvrant la période du 6 février (date de la mise à disposition du vaccin en France) au 11 février 2021, avec des données complémentaires jusqu’au 16 février, alors qu’environ 60 000 personnes avaient reçu ce vaccin selon le site data.gouv.fr (8). Des effets indésirables ont été rapportés chez 374 personnes, dont un syndrome pseudogrippal chez 363 personnes. La fièvre a été parfois d’au moins 39 °C, souvent moins de 24 heures après la vaccination. Afin de ne pas perturber le fonctionnement des services de soins, l’ANSM préconise de vacciner de façon échelonnée les professionnels travaillant dans un même service. Une fréquence élevée de syndromes pseudogrippaux intenses après la vaccination par le vaccin covid-19 ChAdOx1-S a aussi été rapportée en Allemagne et en Suède (8).

D’éventuelles aggravations d’infections par le Sars-CoV-2 liées à la vaccination n’ont pas été rapportées, alors que cette hypothèse avait été soulevée à la suite d’études chez des animaux avec un vaccin coronavirus Sars-CoV-1 (2). Cet effet indésirable est identifié comme un risque à surveiller dans le « Plan de gestion des risques » validé par l’EMA (3).

Peu ou pas d’efficacité sur des variants porteurs de certaines mutations ? Des données concernant l’évaluation de l’efficacité du vaccin covid-19 ChAdOx1-S sur des souches du virus porteuses de certaines mutations génétiques (alias variants) ont été rendues publiques sur internet, avant relecture par des pairs en vue d’une éventuelle publication dans une revue scientifique (9,10).

Un des quatre essais pris en compte pour évaluer l’efficacité du vaccin a été réalisé au Royaume-Uni, chez environ 8 500 participants (9). Un séquençage du génome du virus, réalisé chez 120 participants ayant eu une maladie covid-19 symptomatique, a montré qu’environ 30 % de ces patients étaient infectés par la souche B.1.1.7 du Sars-CoV-2 (alias souche VOC202012/01 ou variant « anglais »). L’efficacité du vaccin covid-19 ChAdOx1-S pour prévenir une maladie covid-19 symptomatique liée à cette souche a semblé proche de celle rapportée chez l’ensemble des participants inclus dans l’essai (9).

Un autre essai randomisé a été réalisé en Afrique du Sud chez environ 1 500 adultes âgés de moins de 65 ans (10). Après un suivi médian d’environ 4 mois après la vaccination, il n’a pas été démontré d’efficacité clinique du vaccin dans cet essai avec, à partir du 15e jour après la 2e injection, 19 cas de covid-19 symptomatiques dans le groupe vaccin versus 23 cas dans le groupe placebo. Dans cet essai, la souche isolée de Sars-CoV-2 a été la souche B.1.351 (alias souche 501Y.V2 ou variant « sud-africain ») chez 39 participants sur les 42 ayant une maladie covid-19 symptomatique (10).

Une seule dose en cas d’antécédent d’infection par le Sars-CoV-2 ? Chez les patients ayant un antécédent d’infection par le Sars-CoV-2 (symptomatique ou non), la Haute autorité de santé (HAS) française a recommandé de faire une seule injection de vaccin covid-19, sans injection de rappel (11). Cette recommandation ne se base pas sur des essais cliniques, mais sur des études d’immunogénicité qui ont montré une réponse immunitaire plus élevée après une seule injection chez les personnes ayant un antécédent d’infection par le Sars-CoV-2 qu’après deux injections chez les personnes sans un tel antécédent. Les vaccins utilisés dans ces études étant des vaccins à ARN messager, l’extrapolation de ces résultats au vaccin covid-19 ChAdOx1-S est incertaine (11).

Commandes et livraisons via les pharmacies de ville. En France, les médecins généralistes doivent s’enregistrer auprès d’une pharmacie de ville afin de se procurer les doses de vaccin covid-19 ChAdOx1-S. Au début de chaque semaine, les pharmaciens commandent les doses souhaitées par les médecins qui se sont enregistrés dans leur officine sur le site declarations‑pharmacie.ars.sante.fr, pour une livraison via les grossistes-répartiteurs la semaine suivante. Fin février 2021, les doses sont contingentées (12).

Un flacon de 10 doses avec des contraintes de conservation. Le vaccin covid-19 ChAdOx1-S est commercialisé en flacons de 10 doses de 0,5 ml, qui se conservent entre 2 °C et 8 °C (4). La solution est prête à l’emploi. Après prélèvement de la première dose, les doses suivantes sont à utiliser dans les 6 heures si le flacon est conservé à température ambiante, ou dans les 48 heures s’il est conservé entre 2 °C et 8 °C (12).

Informer, surveiller, notifier. Fin février 2021, les informations à partager avec les personnes invitées à se faire vacciner avec le vaccin Covid-19 ChAdOx1-S sont principalement :

  • Une efficacité préventive démontrée uniquement à court terme et partielle, de l’ordre de 65 % chez les adultes âgés de moins de 55 ans ; et probablement moindre sur certaines souches du virus ;
  • La nécessité de poursuivre, tant que la pandémie perdure, les autres mesures de prévention et notamment les gestes barrières, même après une vaccination complète ;
  • Une efficacité non démontrée chez les personnes âgées de plus de 55 ans ;
  • La survenue fréquente de syndromes pseudogrippaux souvent intenses et qui surviennent moins de 24 heures après l’injection dans la majorité des cas. Le paracétamol est une option quand ce syndrome est trop gênant, à la condition de maîtriser sa posologie.

Les professionnels de santé ont aussi à organiser une surveillance des personnes vaccinées durant au moins 15 minutes suivant l’injection intramusculaire du vaccin, afin d’agir très rapidement en cas de réaction anaphylactique. Il importe d’avoir à disposition immédiate le matériel et les médicaments nécessaires pour le traitement d’une telle réaction, dont de l’adrénaline injectable (4,12).

Une surveillance à plus long terme est aussi à mettre en place pour repérer d’éventuels événements indésirables graves survenus suite à cette vaccination. Il est utile de notifier les effets indésirables graves ou inattendus aux centres régionaux de pharmacovigilance ou sur le site signalement.social-sante.gouv.fr.

©Prescrire 25 février 2021

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *