Infection par le Sars-CoV-2 au cours de la grossesse : risque accru de complications et de forme grave de covid-19

La revue PRESCRIRE nous informe:

www.prescrire.org

Infection par le Sars-CoV-2 au cours de la grossesse : risque accru de complications et de forme grave de covid-19
Fin 2020, les quelques données disponibles semblaient montrer un surcroît de prééclampsies et de naissances prématurées, et des hospitalisations plus fréquentes en soins intensifs, quand une maladie covid-19 survenait chez une femme enceinte (1). Début mai 2021, nous avons recensé par notre veille documentaire deux études de cohorte qui apportent des informations complémentaires sur les risques liés à une infection par le Sars-CoV-2 pendant la grossesse (2,3).

Surcroît de complications et de formes graves de covid-19 en cas d’infection en fin de grossesse, dans une vaste étude de cohorte rétrospective étatsunienne. Une étude de cohorte, effectuée de manière rétrospective à partir d’une base de données étatsunienne d’assurance maladie, a comparé 6 380 femmes enceintes, proches de l’accouchement, infectées par le Sars-CoV-2 (avec ou sans symptômes) à 400 066 femmes non infectées, les témoins, lors de l’accouchement. Toutes les femmes incluses dans cette étude ont accouché à l’hôpital, entre avril et novembre 2020 (2). Les femmes infectées par le Sars-CoV-2 avaient un peu plus souvent une obésité (17 % versus 15 %) ou un diabète (environ 5 % versus 4 %), ces différences étant statistiquement significatives (2).

Selon une analyse ayant pris en compte certains facteurs de confusion, dont l’obésité et le diabète, diverses complications de la grossesse ont été un peu plus fréquentes chez les femmes infectées en fin de grossesse par le Sars-CoV-2, notamment : naissances prématurées (environ 7 % versus 6 % chez les témoins), prééclampsies (environ 9 % versus 7 %). Ces différences sont toutes statistiquement significatives (2).

Selon les données de sortie de l’hôpital (après un séjour d’une durée moyenne d’environ 3 jours), environ 3 % des femmes infectées par le Sars-CoV-2 ont été hospitalisées en unité de soins intensifs, versus 0,5 % des témoins. La mortalité a été nettement plus élevée parmi les femmes enceintes infectées par le Sars-CoV-2 : de l’ordre de 140 pour 100 000, versus 5 pour 100 000 femmes non infectées (2). Soit un risque de mortalité chez des femmes proches de l’accouchement 26 fois plus grand en cas d’infection par le Sars-CoV-2 que chez celles non infectées (intervalle de confiance à 95 % (IC95) : 11 à 60). Selon les statistiques étatsuniennes, dans la population générale des femmes de la tranche d’âge 20-39 ans, la mortalité a été d’environ 96 pour 100 000 femmes infectées par le Sars-CoV-2 (4).

Des risques confirmés dans une étude prospective internationale. Une autre étude de cohorte, prospective cette fois, a été menée entre mars et octobre 2020, dans 18 pays répartis à travers le monde. Cette étude a comparé 706 femmes ayant été infectées au cours de la grossesse par le Sars-CoV-2 (environ 40 % d’entre elles étaient asymptomatiques), à 1 424 femmes enceintes non infectées (3). Pour chaque femme enceinte infectée par le Sars-CoV-2 dans une des institutions ayant participé à l’étude, deux femmes enceintes non infectées ont été incluses, comme témoins, parmi celles venues consulter ou accoucher immédiatement après. S’agissant d’un recrutement hospitalier, les femmes incluses dans l’étude, cas et témoins, étaient enceintes depuis au moins 25 semaines. Par rapport aux femmes enceintes non infectées, celles infectées par le Sars-CoV-2 avaient plus souvent un surpoids (environ 49 % versus 40 %) ou un diabète (5 % versus 1 %) (3).

Après prise en compte du pays d’inclusion et de certains facteurs connus de complications de la grossesse, dont le surpoids et le diabète, cette étude a montré, elle aussi, un surcroît de complications chez les femmes infectées en fin de grossesse par le Sars-CoV-2 : naissances par césarienne (environ 49 % versus 38 % chez les femmes témoins), naissances prématurées (environ 23 % versus 14 %), prééclampsies ou complications apparentées (environ 8 % versus 4 %), poids de naissance inférieur à 2 500 g (21 % versus 13 %) (3).

En outre, cette étude a mis en évidence un risque accru de diverses affections néonatales sévères (notamment d’origine respiratoire, neurologique, circulatoire ou infectieuse) chez les enfants d’une mère infectée par le Sars-CoV-2 : environ 6 % versus 2 % des enfants du groupe témoin (3). Il n’est pas exclu que certaines de ces complications néonatales soient liées aux conséquences du surcroît de prématurité (5).

Selon une analyse en sous-groupes, de plus faible niveau de preuves, le surcroît de complications de la grossesse et néonatales est surtout apparent chez les femmes infectées qui avaient des symptômes de covid-19 (3).

Dans cette étude qui couvre des pays hétérogènes quant aux infrastructures de santé, environ 8 % des femmes infectées par le Sars-CoV-2 ont été hospitalisées en unité de soins intensifs, versus 2 % des femmes non infectées. Un risque accru de mortalité a aussi été mis en évidence chez les femmes enceintes infectées par le Sars-CoV-2, avec une différence relative semblable à celle observée dans l’étude étatsunienne : le risque de mort au cours du suivi a été 22 fois plus grand chez les femmes infectées par le Sars-CoV-2 en fin de grossesse que chez celles non infectées (IC95 : 3 à 172) (3).

En pratique : un risque accru de complications autour de l’accouchement et de formes graves de covid-19 en cas d’infection en fin de grossesse. Malgré les limites propres à leurs méthodes respectives, les résultats de ces études sont concordants et confortent les données déjà disponibles. Chez les femmes enceintes, les infections par le Sars-CoV-2 sont associées à un risque accru de prééclampsies et de naissances prématurées. Un surcroît de naissances de nouveau-nés de faible poids et de complications néonatales ont aussi été constatés. Il est vraisemblable que ces risques soient surtout marqués quand l’infection par le Sars-CoV-2 survient en fin de grossesse, et qu’elle est symptomatique. Au cours du troisième trimestre et autour de l’accouchement, le risque de forme grave de maladie covid-19 semble accru. Ces risques liés à la maladie covid-19 en fin de grossesse sont à prendre en compte quand on envisage un vaccin covid-19 chez une femme enceinte ou qui pourrait le devenir.

©Prescrire

Sources :

1- Prescrire Rédaction « Reconnaître une maladie covid-19 et évaluer sa gravité. Rester vigilant, y compris en l’absence de signe de gravité d’emblée » Rev Prescrire 2020 ; 40 (446) : 912-918.

2- Jering KS et coll. « Clinical characteristics and outcomes of hospitalized women giving birth with and without covid-19 » JAMA Intern Med 2021 : 4 pages + suppléments : 5 pages.

3- Villar J et coll. « Maternal and neonatal morbidity and mortality among pregnant women with and without covid-19 infection. The Intercovid multinational cohort study » JAMA Pediatr 2021 : 10 pages + suppléments : 11 pages.

4″Covid public data set ». Site https://data.cdc.gov consulté le 4 mai 2021.

5- Norman M et coll. « Association of maternal Sars-CoV-2 infection in pregnancy with neonatal outcomes » JAMA 2021 : 11 pages.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *