LES ARBRES ET LES PALMIERS en Basse- CASAMANCE Chapitre 3

Quel émerveillement, quel dépaysement quand nous accostons pour la première fois sur la magnifique petite plage de Niomoune, bordée de palmiers, où pour nous accueillir les villageois nous attendent vêtus de boubous colorés, aux bruits des chants, des djembés qui accompagnent les danses !

Peu de variétés dans les palmiers : on voit surtout des cocotiers (cocos nucifera), des rôniers (borassus aethiopum), des palmiers à huile (elaeis guinensis) mais ils sont partout et exploités pour de nombreuses utilisations.

Le palmier à huile, palmier à grandes feuilles palmées, d’un très bel aspect plumeux, ressemblant au cocotier, pouvant atteindre 20 mètres (mais il est rare d’en voir d’une telle taille dans cette région), est utilisé dans la confection :

-des barrières pour ses feuilles palmées

-de l’huile de palme : les femmes écrasent au pilon les fruits de l’inflorescence femelle , de couleur orange, pour en détacher la pulpe par trituration, mise à bouillir avec de l’eau jusqu’à ce que l’huile de palme surnageante puisse être facilement récupérée Elle agrémente certains plats locaux.

– mais aussi l’huile de palmiste, l’amande du fruit, extraite après broyage et cuisson (certains villages ont des moulins motorisés, mais pas dans les îles où nous travaillons)

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noix de coco et fruit du palmier à huile

du vin de palme ou en diola : bounouk, se « récolte »toute l’année mais surtout de novembre à mai. Le « récolteur », incise la base des tiges des inflorescences (et non du bourgeon apical comme dans certains pays, ce qui tue l’arbre), présentes à l’aisselle de chaque feuille ; la sève s’écoule, par l’intermédiaire de petits entonnoirs

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(confectionnés avec une foliole selon un pliage élaboré), et est recueillie dans des bouteilles accrochées à la base de la tige Le récolteur prélève sa récolte deux fois par jour, le matin vers 6 h (il fait encore nuit, mais le vin sera meilleur !) et le soir vers 19h.

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Pour monter à l’arbre, il s’accroche au tronc avec un cerceau de fabrication artisanale, en bois et cordelette fabriqués avec des matériaux issus du palmier, qu’il passe sous ses bras et dans son dos, posant ses pieds nus à même le tronc. Nous avons vu arriver en urgence un récolteur dont le cerceau avait cédé et qui s’en est sorti avec seulement…quelques dizaines de centimètres de suture sur le cuir chevelu, sa tête dans sa chute ayant heurté le tronc d’un autre palmier !!

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Le vin de palme est la boisson de toutes les fêtes : les funérailles (cérémonies à la mémoire des défunts, parfois plusieurs années après le décès, d’autant plus importantes que le sujet était âgé), où l’on doit sacrifier les taureaux, offrir vin de palme , repas, et ce pendant plusieurs jours, aumône aux indigents… ), au cours desquelles sont suivis certains rituels, danses, chants… ; cérémonie d’initiation ( voir les articles du blog des 14,17 et 21 janvier 2008) ; mariages ; baptêmes (présentation du nouveau né au temple de la famille où sont les fétiches) ; fiançailles, confession ; etc.

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Le vin de palme frais est peu fermenté, sucré, apprécié des femmes…mais la fermentation se fait rapidement du fait de la chaleur, le degré d’alcool devenant de plus en plus fort avec les heures et les jours…C’est ainsi que nous pouvons voir, lors de fêtes, des buveurs de vin de palme en état d’ébriété avancée, et lors de nos consultations des sujets atteints d’alcoolisme chronique, qui avouent en boire jusqu’à « au moins » …50 litres par semaine !

des vanneries : nasses, paniers utiles dans la vie quotidienne, quoique souvent remplacés par des ustensiles en plastiques, chapeaux

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-des fétiches, que l’on peut voir à l’entrée des bolongs, des villages, placés dans les nouvelles construction avant la pose du toit, au dessus des portes d’entrée des maisons, des dispensaires…

Les rôniers souvent imposants de par leur taille (plus de 25 m) et leur envergure, présentent des grandes feuilles (costa)palmées , couleur vert gris.

-les inflorescences donnent des fruits de la taille d’une petite noix de coco, formés d’une coque contenant 3 grosses graines dont les enfants aiment à déguster l’amande gélifiée, avant maturité du fruit. A maturité le fruit planté germe formant une grosse racine qui peut notamment être consommée fraîche, ou conservée pour d’autres utilisations culinaires. Avec la coque, les diolas confectionnent une petite louche, la kokobote, avec laquelle ils boivent le vin de palme, sans jamais oublier d’en après verser au sol une lampée pour les ancêtres.

-les feuilles protègent de la pluie les façades, renforcent les clôtures, parfois les toits. Très fibreuses et solides elles sont tressées pour la confection de nattes (abritant du vent, du soleil, de la vue), de paniers , de chapeaux…

-le bois du stipe (le tronc) est un bois fibreux, , imputrescible, non attaqué par les termites, sa partie périphérique est rigide ; il est très utilisé dans la construction des maisons: poutres, cadres de portes et de fenêtres, des abris pour les animaux, des barrières …

-le pétiole (nervure centrale) est très rigide, long de plus d’1,50 m, large de plusieurs cm.

Prélevés sur la feuille fraîche pour être plus facilement travaillés, ils sont découpés en longues tiges, assemblées pour constituer des barrières , placées soit pour protéger les jardins, les concessions (maison et terrain attenant) soit dans les bolongs et la Casamance où elles serviront de pièges à poissons.

Il entre aussi, comme pour le palétuvier, dans la composition des plafonds.

Enfin les femmes en font des « castagnettes », qui donnent un son fort et claquant, les tapant l’une contre l’autre avec dextérité, pour accompagner les chants et donner le rythme aux danseuses.

-il peut être exploité pour le vin de palme mais dans ces îles, les récolteurs semblent lui préférer le palmier à huile, on y voit rarement des bouteilles accrochées aux rôniers.

Les cocotiers, enfin, produisant généreusement tout au long de l’année leurs noix, dont on boit le lait, désaltérant, et dont la pulpe est soit mangée fraîche, soit incorporée à des préparations culinaires, et qui nous sont souvent offertes pour nous remercier par les villageois qui savent que nous en sommes friands.

Docteur Mireille Meyssonnier-Lacroix

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